Modèle de paix et d’amour, symbole de vertu et de justice, modèle de bonté et de fraternité universel, les qualificatifs sont nombreux quand les chrétiens parlent de Jésus. Sont-ils justifiés ?
Afin de connaitre la vie et les paroles de Jésus, il est nécessaire de se plonger dans le Nouveau Testament de la Bible et en particulier dans les Evangiles qui ont été écrites quelques dizaines d’années après sa mort.
Au préalable, il est utile d’indiquer qu’au cours des deux derniers millénaires, Jésus est le seul personnage historique, pour lequel il n’existe aucune preuve écrite ou archéologique de son existence datant de son vivant. Et ce n’est pas faute d’en avoir cherché.
Il est pourtant écrit dans les Evangiles qu’il a attiré des foules énormes, changé l’eau en vin, guéri les pires maladies par la seule imposition de ses mains, fait des pêches miraculeuses, nourri des milliers d’hommes avec cinq pains et deux poissons, ressuscité des morts, marché sur l’eau, calmé une tempête...Mort après avoir été crucifié, il est même ressuscité. Né d’une mère vierge, on ne connait pas exactement les années de sa naissance et de sa mort.
Jésus est donc tout à fait exceptionnel et unique, mais il a fallu attendre plus de 30 ans après sa mort pour que quelqu’un estime devoir écrire sur lui. Il est présenté comme le fils de Dieu, qualificatif que contestent les musulmans et les juifs pour qui il n’est qu’un simple prophète.
Les Evangiles sont néanmoins considérés comme relatant des faits historiques et doivent donc être analysés comme tel, contrairement à l’Ancien Testament qu’une majorité de chrétiens estiment n’être, aujourd’hui, qu’un recueil de légendes.
L’Ancien Testament est pourtant le texte fondateur des religions monothéistes où l’on découvre que Dieu a tué des millions d’hommes, de femmes et d’enfants, à la moindre contestation de son pouvoir. Il contient des Lois qui sont plus des appels au meurtre que des règlements permettant à l’humanité de vivre en paix.
De ce fait, on pourrait penser que Jésus, modèle de paix et d’amour, se soit fortement opposé à ce qui est écrit dans l’Ancien testament. Il a pourtant confirmé son adhésion totale à ce texte :
« N’allez pas croire que je sois venu abolir la Loi ou les Prophètes : Je ne suis pas venu abolir, mais accomplir. Car je vous le dis, en vérité : avant que ne passent le ciel et la terre, pas un i, pas un point sur l’i, ne passeront de la Loi, que tout soit réalisé. Celui donc qui violera l’un de ces moindres préceptes, et enseignera aux autres à faire de même, sera tenu pour le moindre dans le Royaume des Cieux, celui qui les exécutera et les enseignera, celui-là sera tenu pour grand dans le Royaume des Cieux. » (L’Evangile selon Saint Matthieu 5,17-19)
Peut-on être plus clair que Jésus dans la confirmation de la réalité de l’Ancien Testament et du rapport qu’avait Dieu avec l’humanité ? Jésus, fils de Dieu, ne savait-il pas que le texte de l’Ancien Testament ne contenait que des légendes ?
Jésus approuve donc les appels aux meurtres de tous ceux qui se permettent de contester la puissance et l’autorité de Dieu. Il n’en est pas moins considéré par les chrétiens, comme un modèle de bonté et de fraternité universelle.
Que doit-on penser de son discours fondamental à ses douze apôtres au cours duquel il a affirmé (Evangile selon Saint Matthieu 10, 32-39) :
« Quiconque se déclarera pour moi devant les hommes, moi aussi je me déclarerai pour lui devant mon Père qui est dans les cieux ; mais celui qui m’aura renié devant les hommes, à mon tour je le renierai devant mon Père qui est dans les cieux.
N’allez pas croire que je sois venu apporter la paix sur la terre ; je ne suis pas venu apporter la paix mais le glaive. Car je suis venu opposer l’homme à son père, la fille à sa mère et la bru à sa belle-mère : on aura pour ennemis les gens de la famille.
Qui aime son père ou sa mère plus que moi n’est pas digne de moi. Qui aime son fils ou sa fille plus que moi n’est pas digne de moi. Qui ne prend pas sa croix et ne suit pas derrière moi n’est pas digne de moi. Qui aura trouvé sa vie la perdra et qui aura perdu sa vie à cause de moi la trouvera. »
Quand vous répétez à deux reprises dans la même phrase que vous n’êtes pas venu apporter la paix, c’est parce que vous voulez insister sur ce point, afin qu’il n’y ait aucune confusion.
Quand vous ajoutez que c’est le glaive que vous êtes venus apporter sur la terre, c’est sans aucun doute plus la guerre que la paix qui vous guide. Ceux qui ne croient pas en Dieu et en lui devront être combattus par la force. Il n’y a aucune ambigüité sur ce point dans la doctrine de Jésus.
Les intentions de Jésus-Christ sont très claires. Il n’aidera que ceux qui lui sont soumis, les autres seront condamnés. Il ne suffit pas de l’aimer, il faut l’aimer plus que les autres sous peine de ne pas être digne de lui.
Quel modèle de bonté quand il dit que des parents doivent avoir moins d’amour pour leurs enfants que pour lui.
Quel modèle de générosité quand il dit que des enfants doivent avoir moins d’amour pour leurs parents que pour lui !
Quel modèle de fraternité quand il dit que celui qui n’est pas avec lui est contre lui !
Quel modèle d’amour et de paix quand il frappe d’indignité celui qui ne le suit pas et surtout quand il le condamne !
Est-ce cela le modèle de paix des chrétiens ou ont-ils modifié cette doctrine ? Dans ce cas pourquoi continuer à se référer aux Evangiles ?
D’autant que quelques temps plus tard, il ajoute (Evangile selon Saint Matthieu 12,30) :
« Qui n’est pas avec moi est contre moi… »
Ainsi, Jésus, qui est, pour les chrétiens, le modèle de l’amour et de la paix entre les hommes, confirme avec force qu’il s’opposera à ceux qui ne le suivent pas.
Comment continuer à affirmer que Jésus est un modèle d’amour quand il dit dans l’Evangile selon Saint Jean (15,6) :
« Si quelqu’un ne demeure pas en moi, il est jeté dehors comme le sarment et il se dessèche ; on les ramasse et on les jette au feu et ils brûlent. »
C’est cette phrase qui sera utilisée par l’Eglise catholique pour justifier de brûler vifs des hérétiques pendant l’Inquisition.
On trouve aussi dans l’Evangile selon Saint Marc (16,16)
« Allez dans le monde entier, proclamez l’Evangile à toute la création. Celui qui croira et sera baptisé, sera sauvé ; celui qui ne croira pas, sera condamné. »
Ce sont les derniers mots de Jésus-Christ juste avant de remonter définitivement au ciel et de s’asseoir « à la droite de Dieu ». Il est sans aucun doute préférable de croire et d’être baptisé si l’on ne tient pas à être condamné.
Jésus affirme être le fils de Dieu. Ses paroles ne sont pas différentes de celles de Dieu face à ceux qui ne croient pas en lui. A-t-il un autre but que de voir toute l’humanité se soumettre et se prosterner devant lui ?
Comme Dieu dans l’Ancien Testament, Jésus affirme que ses ennemis doivent être exécutés et même égorgés car il dit à la fin de la Parabole des Mines ( Evangile selon St Luc, 19,27) :
« Quant à mes ennemis, ceux qui n’ont pas voulu que je règne sur eux, amenez-les ici, et égorgez-les en ma présence. »
Terrible phrase qui ne devrait pas laisser de place au doute. Jésus estime que ceux qui n’ont pas accepté de lui être soumis doivent être massacrés.
Comment parler d’un Jésus plein d’amour et de paix pour tous les hommes quand on lit cette phrase ?
La solution, très à la mode aujourd’hui, consiste à dire que Jésus ne se mettait pas en scène dans la Parabole des mines et que ce n’est donc pas lui qui demandait d’égorger ses ennemis.
Le problème est que cette explication est en contradiction complète avec une analyse d’une commission pontificale biblique de 2001, préfacée par le cardinal Raztinger. On peut la trouver sur le lien suivant :
http://www.vatican.va/roman_curia/c...
On peut y lire aux paragraphes 74 et 75 :
« La parabole des mines (19,11-27) comporte des traits particuliers fort significatifs. Elle met en scène un prétendant à la royauté qui se heurte à l’hostilité de ses concitoyens. Il doit aller dans un pays lointain, pour être investi du pouvoir royal. A son retour, ses opposants sont exécutés. Cette parabole, comme celle des vignerons homicides (20,9-19), constitue, de la part de Jésus, une pressante mise en garde contre les conséquences prévisibles d’un rejet de sa personne... »
Il ne fait aucun doute que demander à égorger ses ennemis est une pressante mise en garde contre les conséquences prévisibles d’un rejet de la personne de Jésus. Le Vatican ne semble pas choqué que Jésus demande la mort de ceux qui le rejettent puisqu’il parle de conséquences prévisibles. Doit-on s’en étonner ?
Il faut savoir que persévérer à ne pas croire en Jésus est considéré comme un péché « éternel » et ne peut être pardonné :
« Qui croit en lui n’est pas jugé ; qui ne croit pas est déjà jugé parce qu’il n’a pas cru au nom du Fils Unique-Engendré de Dieu. » Saint Jean(3,18)
Or la mort est la conséquence du péché comme l’affirme le Catéchisme de l’Eglise catholique (1008) reprenant ainsi l’Epître aux Romains de Saint Paul (6,23) où il est écrit, « car le salaire du péché, c’est la mort. » :
« La mort est conséquence du péché. »
Que Jésus ait demandé la mort de ceux qui persévéraient à ne pas croire en lui est donc normal et conforme à sa doctrine.
Il me semble qu’on est assez loin de l’idée d’un amour de Jésus pour toute l’humanité et que cet amour est pour le moins sélectif.
En réalité, son objectif est que l’humanité lui soit soumise avec un seul troupeau de brebis et un seul pasteur :
« Moi, je suis le bon pasteur ; je connais mes brebis et mes brebis me connaissent, comme le Père me connait et que je connais le père, et je dépose ma vie pour mes brebis. J’ai encore d’autres brebis qui ne sont pas de cet enclos ; celles-là aussi, il faut que je les mène ; elles écouteront ma voix ; il y aura un seul troupeau, un seul pasteur... » Saint Jean (10,14-16)
Suivre la doctrine de Jésus, c’est vouloir qu’il n’y ait dans le monde qu’un seul troupeau de brebis avec un seul pasteur.
Peut-on se demander si c’est le meilleur moyen pour obtenir la paix dans le monde ? Le monde entier doit-il accepter d’être le troupeau de brebis de Jésus ?
Pour se justifier, les chrétiens indiquent que le commandement le plus important de Jésus est :
« Comme je vous ai aimés, aimez-vous les uns les autres. » Saint Jean (13,34)
L’amour serait ainsi le fondement de la doctrine de Jésus.
Cette phrase, faut-il le remarquer, est prise à la lettre par les chrétiens pour en faire le symbole du discours de paix et d’amour de Jésus pour l’humanité. Quand on analyse les 2000 ans d’histoire de la chrétienté, il semble difficile d’y trouver une confirmation.
En réalité, Jésus ne faisait que s’adresser à ses disciples. Il était loin d’aimer tout le monde. Il semble difficile de prétendre qu’il aimait ceux qui lui résistaient puisqu’il avait demandé qu’ils soient égorgés. A ma connaissance, aucune religion monothéiste ne demande à ses adeptes de se haïr mais effectivement aucune ne leur demande de s’aimer.
Est-il raisonnable de demander à tous ses adeptes de s’aimer ? Car il est bien fait mention d’amour et non de simple respect.
L’amour peut-il se commander ? La question mérite d’être posée compte tenu des connaissances que nous avons sur la nature humaine. Benoît XVI se pose également cette question dans sa lettre « Dieu est amour » et y répond de la manière suivante :
« L’amour peut être « commandé » parce qu’il est d’abord donné. »
Ainsi le pape Benoît XVI estime que si quelqu’un donne son amour, il est en droit d’imposer qu’il soit aimé aussi. Curieuse conception de l’amour qui semble particulièrement dangereuse pour ne pas dire perverse.
Ne serait-il pas préférable de parler de respect plutôt que d’amour ?
Par contre, il est exact que Jésus a fait un commandement très particulier :
« Aimez vos ennemis, et priez pour vos persécuteurs afin de devenir fils de votre Père qui est aux cieux, car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et tomber la pluie sur les justes et les injustes. » Saint Matthieu (5,44-45)
Jésus avait l’ambition de faire de ses disciples des brebis qui n’avaient pas à se faire justice elles-mêmes. Seul le pasteur a le droit de punir. Les seuls ennemis qui devaient être punis étaient ceux qui étaient contre lui ou contre Dieu. Ce n’est que justice et conforme à ce qu’affirmait Saint Augustin dans sa lettre 185 :
« Si nous voulons donc être dans le vrai, disons que la persécution exercée par les impies contre l’Eglise du Christ est injuste, tandis qu’il y a justice dans la persécution infligée aux impies par l’Eglise de Jésus-Christ. »
Il est utile de rappeler que Benoît XVI a estimé le 9 janvier 2008 que « rarement une civilisation n’a rencontré un si grand esprit, qui sache en accueillir les valeurs et en exalter la richesse intrinsèque » à propos de Saint Augustin.
On peut se demander si les responsables de l’Eglise catholique se sont démarqués de cette conception de la justice quand on peut lire dans le « Directoire général pour la catéchèse » (22,33-34) du Vatican, datant de 1997, texte de référence actuel pour toute l’Eglise catholique concernant la catéchèse :
« L’athéisme, négation de Dieu, compte parmi les faits les plus graves de notre temps. Il s’exprime avec des nuances diverses, mais de nos jours, il se manifeste sous la forme du sécularisme qui consiste en une vision autonomiste de l’homme et du monde d’après laquelle ce dernier s’explique par lui-même sans qu’il soit besoin de recourir à Dieu. »
On pouvait imaginer que l’Eglise catholique, par amour pour tous les humains, se contenterait de prévenir les athées qu’ils n’auront pas droit à la vie éternelle et qu’ils vivront l’enfer après leur mort. En réalité, en conformité avec la doctrine de Jésus, elle n’accepte toujours pas que des hommes et des femmes puissent refuser d’être soumis à Dieu.
Affirmer que l’athéisme compte parmi les faits les plus graves de notre temps n’est-il pas une remise en cause de l’Article 18 de la Déclaration des Droits de l’Homme de 1948 :
« Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion... »
Ce droit est rappelé dans l’article 10 de la Charte des Droits Fondamentaux de l’Union Européenne.
On peut se demander comment l’Eglise catholique règlerait le « problème » de l’athéisme si elle avait encore le moindre pouvoir politique et législatif.
Peut-on aspirer à la paix dans le monde et contester le droit aux hommes et aux femmes de penser et vivre comme ils le désirent ?
N’est-on pas en droit de se poser aussi quelques questions quand les responsables religieux chrétiens présentent un livre de la Bible, la « Sagesse de Salomon », comme un modèle de moralité ? Dans une homélie prononcée le 6 mai 2006, le pape Benoît XVI a indiqué ce qu’il fallait penser de ce livre :
« Ce livre est tout entier un hymne de louanges à la sagesse divine, présentée comme le trésor le plus précieux que l’homme puisse souhaiter découvrir, le bien le plus grand dont dépendent tous les autres biens. »
Or on peut y lire :
« Mais les impies auront un châtiment conforme à leurs pensées, eux qui ont négligé le juste et se sont écartés du Seigneur. Car malheur à qui méprise sagesse et discipline : vaine est leur espérance, sans utilité leur fatigue, sans profit leurs œuvres ; leurs femmes sont insensées, pervers leurs enfants, maudite leur postérité ! Heureuse la femme stérile qui est sans tâche, celle qui n’a pas connu d’union coupable…Mais la nombreuse postérité des impies ne profitera pas ; issue de rejetons bâtards, elle ne poussera pas de racines profondes… » Sagesse de Salomon (3,10-13 et 4,3)
Ces phrases sont-elles le « trésor le plus précieux que l’homme puisse souhaiter découvrir. », d’autant que ce livre contient des pages entières du même style ? Le pape a-t-il émis des réserves sur certains passages de ce livre ? Non.
Les discours de Jésus ne contredisent pas ces phrases, ils les confirment. Il faut croire en lui et en Dieu si l’on ne veut pas être définitivement rejeté et condamné.
Proclamer vouloir la concorde et la paix dans le monde comme le font les responsables chrétiens est louable, mais ils oublient toujours de préciser que la condition de cette paix est une soumission totale à Dieu et à Jésus et que ceux qui s’y refusent seront punis en conséquence. La doctrine de Jésus, exposée dans les Evangiles, est très claire sur ce point. Il ne doit y avoir qu’un seul troupeau avec un seul pasteur dans le monde.
Est-il raisonnable d’espérer obtenir la paix dans le monde à cette condition ?
Ne faudrait-il pas que l’Eglise catholique évite d’écrire dans son catéchisme(2105) :
« Les chrétiens sont appelés à être la lumière du monde. »
Reprenant ainsi le Sermon sur la Montagne de Jésus,
« Vous êtes la lumière du monde. » Saint Matthieu(5,14).
Tous les chrétiens pensent-ils vraiment que le monde serait dans les ténèbres si la croyance en Jésus n’existait plus ?
Qui doit-on croire quand on peut lire aussi dans le Coran, à propos des musulmans :
« Vous êtes le peuple le plus excellent qui soit jamais surgi parmi les hommes. » Sourate (3,106)
Et que l’on peut lire aussi dans la Thora à propos des juifs :
« Yahvé t’a choisi pour être son peuple à lui parmi tous les peuples qui sont sur la terre. » Deutéronome(14,3)
Quand des religions indiquent vouloir la paix dans le monde et prétendent en même temps être supérieures aux autres, on ne peut être que préoccupé.
Quand des religions ont pour objectif d’imposer leur vérité et leur manière de vivre à ceux qui ne pensent pas comme eux, il semble difficile, pour ne pas dire impossible, d’imaginer que les hommes ne s’entretueront plus à cause de leur croyance en Dieu.